Par Julien TURCZYNSKI
Quotidiennement, la presse se fait l’écho des difficultés propres au secteur de l’immobilier français.
En effet, nombreux sont les analystes qui n’hésitent plus à parler de véritable crise immobilière, qui, de manière inéluctable, avance à pas feutrés. Notamment en raison de la raréfaction de l’octroi des crédits et l’augmentation continue des taux d’intérêts. Les professionnels du droit des entreprises en difficulté doivent être attentifs à ce phénomène car ils ont, pour beaucoup d’entre eux, relevé que de nombreuses foncières ou autres promoteurs immobiliers connaissent depuis quelques mois nombre de difficultés insurmontables conduisant inéluctablement à l’ouverture, à tout le moins, d’une procédure préventive.
Pour notre part, nous avons observé que des acteurs de ce secteur en difficulté doivent bénéficier d’un traitement particulier fort éloigné de ce qui leur a été réservé lors de décisions récentes. En effet, eu égard à l’absence de conséquences sociales importantes en matière d’emploi, les Tribunaux ont tendance à prononcer des liquidations judiciaires directes et dans le meilleur des cas, l’ouverture d’un redressement judiciaire avec une période d’observation très courte, insusceptible de permettre au débiteur de présenter un plan de redressement par voie de continuation.
De ce constat, il apparaît nécessaire que ce secteur d’activité en difficulté reçoive un traitement approprié afin d’éviter que se retrouvent sur le marché des milliers de mètres carrés, ce qui entraînera automatiquement un effondrement des prix, phénomène d’ailleurs déjà observé depuis plusieurs mois et ce dans toutes les catégories de biens.
Il faudrait sans doute concevoir la procédure collective de ces foncières et de ces promoteurs d’une manière originale, laquelle pourrait s’orienter vers les axes suivants : – organiser une défaisance étalée dans le temps ; sachant qu’un plan de redressement judiciaire par voie de continuation n’a pas pour vocation de céder les actifs ; l’apurement du passif reposant sur une exploitation redevenue saine ; – faire intervenir les investisseurs qui seraient dans la capacité de reprendre les rênes de ces entreprises, de céder les actifs les moins intéressants et de permettre la conservation de ceux qui représentent une valeur sûre afin d’éviter de les brader.
Cela implique de la part des praticiens du droit des entreprises en difficulté et des Tribunaux la recherche de moyens visant à concilier le droit des entreprises en difficulté avec ces objectifs. Les dispositions relativement nouvelles du l’ordonnance 2021-1193 du 15 septembre 2021 portant réforme du livre VI du code de commerce et du décret 2021-1218 du 23 septembre 2021, instaurant les classes de parties affectées pourront sans doute séduire les investisseurs et les amener vers une reprise de ces débiteurs dans des conditions de sécurité juridique et financière séduisantes afin d’éviter que les solutions liquidatives immédiates n’entraînent de facto une aggravation de la situation de ce secteur économique d’ors et déjà en tension.
Il faudra imaginer un dispositif adroit qui amènerait les investisseurs et les créanciers à un accord sur le long terme pour éviter un effondrement du marché et des prix, compromettant par là même des espoirs de recouvrement et de valorisation des garanties bénéficiant notamment aux créanciers bancaires.