Par Selima Chahed
Le droit de rétention né postérieurement au jugement d’ouverture est inopposable à la procédure collective !
En d’autres termes, les créanciers inscrits au passif antérieur, dont le droit de rétention est né après le jugement d’ouverture, ne peuvent prétendre à un paiement préférentiel au détriment des autres créanciers.
Pour rappel, le droit de rétention, régi par l’article 2286 du Code Civil, permet à un créancier de retenir une chose qui lui a été confiée par son débiteur, jusqu’à ce qu’il soit payé de sa créance. Le créancier peut ainsi refuser de restituer le bien tant que le débiteur n’a pas rempli ses propres obligations.
Un créancier qui use d’un droit de rétention dispose donc d’une situation éminemment favorable, ce moyen de pression lui assurant d’être désintéressé par priorité aux autres créanciers.
En matière de procédures collectives, la Loi prévoit le principe de l’interdiction des paiements des créances antérieures au jugement d’ouverture (article L.622-7 du CCom). Comment concilier cette interdiction avec le droit de rétention du Code Civil ?
Lorsqu’on se situe après le jugement d’ouverture, le créancier conserve son droit de rétention et peut parfaitement retenir un bien qui lui aurait été confié pendant la période d’observation en cas de non-paiement par le débiteur de ses factures émises pendant cette même période.
De même, un créancier peut, sous certaines conditions, opposer un droit de rétention si sa créance est antérieure et que le bien lui a été confié antérieurement au jugement d’ouverture.
En revanche, la situation est différente lorsque la créance est antérieure mais que le bien a été confié postérieurement au jugement d’ouverture.
La justification de cette règle se comprend aisément : accorder à un créancier disposant de créances antérieures le droit de retenir un bien confié postérieurement au jugement d’ouverture, autoriserait l’organisation, au détriment des autres créanciers, d’un paiement préférentiel.
Dans une décision récente (Tribunal de Commerce de NANTERRE, 18 juillet 2023) le juge des référés est venu rappeler ce principe.
Dans cette affaire, une société en redressement judiciaire disposant d’un parc de véhicules a confié la maintenance d’un de ses camions à un garagiste et ce, postérieurement au jugement d’ouverture.
Usant d’un supposé droit de rétention, le garagiste a refusé de restituer le véhicule, prétextant que ses factures, antérieures au jugement d’ouverture, demeuraient impayées.
Le juge des référés a naturellement condamné le garagiste à restituer le véhicule, son droit de rétention n’étant opposable à la procédure.
Cette décision réaffirme un principe déjà consacré par la jurisprudence, selon lequel un créancier ne peut opposer un droit de rétention pour obtenir le paiement d’une créance antérieure au jugement d’ouverture que si ledit droit de rétention existait antérieurement au jugement d’ouverture.
Cour de Cassation, Chambre commerciale, du 13 novembre 2001, 98-20.207
Cour d’Appel de Versaille, 12e chambre, 30 janvier 2020 n°18/08231
Cette décision nous permet de rappeler que le gage, dont découle le droit de rétention, constitue une sûreté efficace et confère un levier capital aux créanciers pour faire valoir leurs droits.
L’efficience de cette sûreté demeure dans le cadre des procédures collectives, encore faut-il en respecter les conditions établies par la Loi et la jurisprudence.
Le droit de rétention, régi par l’article 2286 du Code Civil, permet à un créancier de retenir une chose jusqu’à être payé de sa créance.
En matière de procédures collectives, l’interdiction des paiements des créances antérieures au jugement d’ouverture (article L.622-7 du CCom) peut entrer en conflit avec le droit de rétention.
Lorsque la créance est antérieure mais que le bien a été confié postérieurement au jugement d’ouverture, le droit de rétention est inopposable à la procédure collective.
La justification de cette règle se comprend aisément : accorder à un créancier disposant de créances antérieures le droit de retenir un bien confié postérieurement au jugement d’ouverture, autoriserait l’organisation, au détriment des autres créanciers, d’un paiement préférentiel.
Une décision récente du Tribunal de Commerce de NANTERRE a réaffirmé ce principe, reconnue par une jurisprudence constante, en condamnant un garagiste à restituer un véhicule confié postérieurement à la procédure de redressement judiciaire.